Nom : Fabien Bellat
Lieu de résidence : Paris (75)
Activité : maître en Histoire de l'Art (oh le beau diplôme à mettre sur le mur !) à l'Université Paris X ; prépare actuellement un DEA

Courriel : bellatores@wanadoo.fr


Activités au sein du collectif :
initiateur de nombreux travaux en commun, notamment des écrits à plusieurs mains ; organisateur de plusieurs réunions de groupe ; coordinateur de nombreuses activités du groupe

Choix d'oeuvres :

Présentation personnelle :
     SE PR
ÉSENTER ressemble toujours à de l'auto-célébration.
Alors j'essaierais la sobriété (ce n'est pas gagné d'avance).
Comment parler de moi ? Par des projets, sans doute. Je suis de ceux que ne quitte pas le baroque démon de l'enthousiasme. J'aime me sentir possédé par une histoire. J'aime me lancer corps et âme dans une création, même si je suis conscient qu'elle me dépasse.
Récapitulons. Parce que les résumés sont plus parlants que les rhétoriques. Ma passion pour les arts remonte à l'enfance. Très tôt, j'ai été familiarisé avec la littérature, la peinture, l'architecture...
Mais je n'ai vraiment écrit qu'à partir de ma rencontre avec Henrri De Sabates. Malgré mes précédents petits récits, textes sincèrement minuscules...nos discussions à Henrri et moi ont été un catalyseur, l'impulsion de se mettre à écrire.
Un goût commun pour le surréalisme nous poussa à improviser nos premiers poèmes, ainsi qu'un importante pièce en écriture automatique :
Le Royaume de la Pensée.
Autour de Sébastien et moi, autour d'une table s'est bientôt crée un groupe que les arts réunissaient : ce milieu a été ma naissance artistique.
Ainsi, avec mon ami le compositeur Alexandre Fontaines j'écrivais la pièce burlesque
La Ménagerie divine, que je conçois comme mon retour à la création en commun et au théâtre, après ma première pièe en solo, Un Prophète de plus (écrite à mon arrivée à Paris, d'abord baptisée "Le Prophète" et lue sous ce titre à l'église St-Vivien de Rouen).
D'ailleurs, bien que je travaillais désormais des sujets plus personnels, j'ai continué la fructueuse collaboration avec Alex. Je lui proposai un rêve dément...ressuciter l'opéra, dans toute sa superbe, dans sa flamboyance démesurée...
J'écrivis donc
Ravaillac, immense livret d'opérat historique en V actes. De la folie pure. Puisque j'ai eu légèrment les yeux plus gros que le ventre, je me propose un jour de réecrire un livret plus réalisable, mais toujours aussi épique.
Un peu effrayés par l'ampleur de la chose, Alex et moi pensâmes à un travail plus modeste. Après mûre réflexion, je lui indiquai la possibilté d'un opéra-comique, genre moins exigeant et plus aisé à la composition pour de pures raisons de dimensions.
Problème : sur quel sujet ?
Providentiellement, la plaisanterie-mystification d'une de mes amies à l'encontre d'Aurélien lors d'un de mes anniversaires...me donna l'argument de
La Charcutière de Lille.
C'est l'un des travaux dont je suis le plus fier. Ce livret d'opéra-comique en I acte joyeusement historique et énormement massacreur est certainement ce que j'ai fait de plus inhabituel.
Je vais changer de ton. Parler d'échecs, par exemple. Je fais un poète exécrable. Sébastien ou d'autres ont la fibre poétique. Moi non. Par contre, j'ai l'instinct narratif. Et également celui de la tentation épique, des grandes fresques animées.
En dépit de mon peu d'intimité avec le contraire de la prose, j'ai composé le cycle
Les Villes évanouies, cinq longs poèmes narratifs dans le genre "Homère gothique".
Je ne sais toujours pas comment j'ai fait.
Une déception est aussi celle de mon "Opération musée", consistant à prendre les tableaux d'histoire du XIX
ème siècle pour base d'intervention écrite, qui n'a été que très malaisément suivie par le groupe.
Par ailleurs, j'ai récemment donné dans la note théorique avec
Cahier new-yorkais, rédigé lors d'un voyage à New-York. J'y synthétise plusieurs aspirations quant aux arts.
Actuellement, je planche sur un petit recueil de nouvelles très pittoresques... Je réserve la surprise.

     J'en viens à l'essentiel.
Depuis longtemps j'oeuvre assidûment sur un vaste et inquiétant roman. Je l'entoure d'une stricte confidentialité. Même de nombreux membres du groupe ignorent tout de ce roman que j'annonce simplement dantesque. Un jour, il parlera de lui-même.
Pour finir, j'évoquerai brièvement mon implacable et fatale
Cassandre, ambitieuse tragédie en V actes qui sera sans doute ma dernière incursion avant longtemps dans le domaine du théâtre, genre qui m'a apporté autant de déceptions que d'effervescentes joies.
Je devrais aussi citer
Éphémérides de Versailles, récit que j'ai rédigé lorsque je travaillais au château, château de Versailles que j'ai pu connaître en intime, et qui m'a donné beaucoup, en art comme en coeur.
Quant aux scénarios, je ne m'y suis attelé que depuis peu. Une grande amie m'a fait comprendre à un moment donné que je devrais concrétiser ma passion pour le cinéma.
J'ai suivi son conseil. Je me suis exercé sur
L'Arpenteur, mon premier et très expérimental court-métrage pour lequel j'ai non seulement écrit le script mais aussi réalisé et joué... Expérience aussi folklorique que difficile.
Cependant, je considère que seul mon deuxième film,
Coal Men, mérite un tant soit peu d'attention. Il a été porté par l'interprétation des acteurs. Et je pense avoir cette fois-ci mieux senti les images s'affirmant face à la narration. Mais il y a encore du travail. J'espère pouvoir continuer à trouver une beauté cinématographique avec E*****, scénario écrit avec Henrri afin de lancer notre cycle "Les VIII films d'ERBEFOLE".
En outre, j'ai évidemment d'autres projets. Je les réaliserais avec conscience et inspiration. La fertilité d'idées et d'esthétique appelle aussi la flamboyance ! Je n'oublie pas les drames humains, les Histoires fantastiques ou douloureuses, amoureuses... Il faut de l'imagination, du travail, de la beauté - le regard de la résurgence allié à l'engagement. Dans tout ce que je mets en  oeuvre je veille à inscrire le plus grand, le plus créateur.

Fabien BELLAT
Rouen, 15 mars 2002
 

 

Fabien écrit...


à Paris


à Paris


à Canteleu


en Jordanie


à New-York


à New-York


au Varat


 à Hardelot


à Sables-d'Or-les-Pins


 à Amsterdam (1998)

 
à Amsterdam (2002)

 
à Villers-sur-Mer


à Colleville-sur-Mer

 
à Rome

 

 

 

Ecrire Balnéaire

     Les obsessions puis hantises s'imposent.
Mes écrits vivent d'images frappantes, de ces visions vous assaillant lorsqu'on prend ses quartiers dans un lieu hors du commun.
Palerme, même si je n'y ai rien rédigé, nourrit une certaine forme de mon imaginaire ; toute l'Italie ressurgit dans mes récits par l'ombre de l'Histoire, par l'inspiration et recomposition de grandes figures.
Ces gestes pourraient inquiéter : l'endroit écrase-t-il l'oeuvre ? Ce que je vois c'est que l'imagination s'empare d'une atmosphère pour mieux la reformuler - l'éternelle opération démiurgique.
Les cathédrales, palais, fortifications, souvent me servent afin de montrer l'homme finalement réduit à néant par son impressionante, vivante création. Les monuments retournent toujours la domination du créateur contre celui-là même s'en prétendant le maître.
Rome a croulé sous ses colonnes...
Aujourd'hui ceci ne me tourmente point. Un vide m'angoisse. Un esprit, immanent mais tangible, m'impressionne.
Je veux parler du fantôme de villes balnéaires.
Certaines de ces stations ont poussé l'orgueil jusqu'à se proclamer rêve d'une vie. Les fondateurs ont vu le songe se muer en cauchemar lorsque l'Histoire a rattrapé leur utopie plaisancière.

      J'étudie l'architecte* d'une de ces villes contre-nature. Et les vestiges douloureux de son orgueil m'ont plongé dans le malaise, un malaise nommé Hardelot.
Les rues pittoresques, les villas pesamment et savamment pittoresques, le tracé d'une ville admirablement pittoresque luttant contre les dunes omniprésentes... puis la Première Guerre Mondiale qui interrompt l'enthousiasme. Guerre arrivant tel un mausolée, ensuite l'ultime bétonisation d'un XXème siècle dévoyé dans la minéralité anonyme...
Le résultat : une abomination pour laquelle l'homme ne saurait être qu'ombre de lui-même, une silhouette osant à peine raser les murs ou les sables. De peur d'y voir se reflèter son intolérable vacuité.
Ces villes sont bien faites pour les ténèbres d'une écriture désabusée.
Des tragédies insignifiantes doivent s'y nouer sans cesse.
Derrière les jeux de la plage, les pendus dans un cagibi balnéaire.
Un autre de ces urbanismes ex-novo, en Bretagne**, m'a tourné vers l'exorcisme des images cinématographiques***, tant l'impression d'inachèvement, de rêve fracassé y est étrange.
Pourtant je réalise combien ces ectoplasmes urbains s'affirment nombreux parmi mon univers. Les pins, la comédie paysagère ne parviennent plus à dissimuler l'imposture. Ce sont de telles apparences dont s'inspire quelque fois l'art.
Si l'existence humaine peut être soumise au doute, alors véritablement ses apparences de rêves martyrisant le sable et les eaux sous la tentative de hiérarchisation urbaine... se dévoilent encore plus sujets à la dramaturgie humaine.
Des sentiments tiennent à peu de choses.
Des idéaux tournent vite à la corruption prosaïque.
Les villes balnéaires - plus soumises que toutes les autres à l'éphémère puisque destinées au plaisir épisodique - deviennent un résumé burlesque.
Des parodies d'existence. Le décor fantasque de l'homme conjurant l'environnement hostile pour mieux le soumettre à sa tentation d'universalité. Ces façades fantaisistes n'abritent qu'une tyrannie, celle de l'existence gratuite contre toutes les formes signifiantes.
Voici pourquoi écrire balnéaire s'avère pour moi chercher le paradigme de la comédie humaine.
Sans doute d'autre quintessences sont à prendre en considération : l'église, le bidonville, la tour... Mais écrire balnéaire ne cachera jamais qu'une fertilité devenue parodique tant elle a tenu à se pérénniser dans le despotisme urbain.
Qui peut sincèrement sentir cette horreur ?
Alors que le soleil éclairait cette ville tournée à la caricature d'elle-même, j'ai voulu fuir cette indicible tristesse. Certaines mélancolies ne se détruisent pas. Je préfère l'écrire.
Ainsi peut-être parlera un peu la vision d'une hantise de toits monstreusement perchés dans les dentelures de dunes mouvantes.

Fabien BELLAT.
Hardelot, 9 décembre 2001.

________
* Louis-Marie Cordonnier (1854-1940), auteur du palais de la Paix de La Haye, de l'Opéra de Lille, de la Basilique de Lisieux.
** Sables-d'Or-les-Pins, près du Cap Fréhel
*** Finalement, le scénario s'est transformé en nouvelle (Obsession Balnéaire B.)

 

 

 

Ecrire les châteaux

 

Ecriture devant le château d’Harcourt (Eure, Normandie)
Fabien à Harcourt

     Paraît-il, notre époque ne construit plus de châteaux.
Quelle erreur incroyable. Certes on n’élève plus de châteaux forts, matériellement parlant.
Mais ils apparaissent visibles.
Quelquefois notre temps se trouve amené à les reconstruire. Cela est l’œuvre des Monuments Historiques, du patrimoine.
Il existe une autre œuvre.
Cette œuvre parle des châteaux.
Plus exactement, elle parle château.
Cette création s’exprime dans un langage castelliforme, elle tend à reprendre les tours, les mâchicoulis, les enceintes fortifiées, les douves, pour dire l’importance épique.
    Que notre époque veuille le réalisme, cela la regarde.
Pourtant il peut se trouver une expression plus élevée, atteignant au monumental.
Ceci, c’est écrire les châteaux.
Non plus les châteaux des hobereaux, non plus les semblants de castels, des capitalistes aux mille ouvriers exploités, mais les châteaux de ceux qui peuvent rêver, de ceux tendant vers un ailleurs qui se pourrait révéler esthétique.
Des châteaux en Espagne…
Toutefois, ce deviendrait une expression autre.
Ecrire château équivaut à affirmer l’indépendance d’un Verbe, refusant l’ordinaire, appelant la différence fertile, voulant une beauté exaltante.
Que cet écrire-château se traduise en roman, film, poésie, qu’importe.
L’écrire-château connaît un atemporel de l’intervention artistique.
Ce ne doit pas être du nouveau médiéval. La nostalgie ne possède aucune place dans l’écriture-château. La reconstruction se révèle non plus féodale, mais créative.
    En somme cette écriture tend à l’exigence d’une extériorisation de soi pour pérégriner vers l’inattendu, l’étrange – sinon les touristes ne visiteraient pas ces demeures devenues incompréhensibles.
    Evidemment un château n’a plus rien à voir avec notre époque. Un château ne peut que figurer un anachronisme.
Un anachronisme peut susciter un effort de compréhension, de dépassement. C’est pourquoi ce flamboyant objet non identifié permet une création. Car il attend la recomposition. La réinvestigation pleine de sève. L’imaginaire existe… Il s’agit de lui inventer son art.
    Avant de l’exprimer, cet imaginaire, il faudra l’investir. Le siège pourrait s’avérer long. Ce deviendrait une croisade créative.
Lorsque les clefs seront tenues, alors l’œuvre de reconstruction pourra commencer.

Fabien BELLAT
Harcourt, 22 juin 2002.